Athenais Moore | The moon wears a shine when you wear a smile

Je suis née dans une famille aimante, de deux parents désirant fonder un foyer dans lequel se sentir bien pour le reste de leurs jours. Malheureusement, un an environ après ma naissance leurs rêves ont été brisés et ma famille par la même occasion. Ma mère m’a éloignée de mon père après son infidélité. Je n’ai plus jamais revu mon père après cela. Autant dire qu’à un an et demi, les souvenirs étaient peu nombreux.

On a d’abord habité à Missoula avant qu’une opportunité professionnelle pour ma mère ne nous amène à emménager à Flasgstaff en Arizona. J’avais cinq ans quand je débarquai dans cette nouvelle ville. C’était pour moi une chouette aventure que de traverser le pays pour une nouvelle vie. Avec ma mère, nous étions inséparables. Elle était à la fois ma mère mais aussi une grande sœur. Notre relation fusionnelle enviait mes copines d’école qui trouvait leur mère trop ringarde ou envahissante. La mienne était permissive et toujours dans le coup. Je ne dis pas que je ne me suis pas pris quelques soufflantes à certaines de mes bêtises, mais avec elle je n’avais jamais peur d’en faire. Elle me répétait sans cesse « faire des erreurs, c’est expérimenté la vie et construire notre personne de demain ».

Ce serait mentir si je disais que vivre sans père ne me pesait pas. Même si la relation était basée sur la sincérité, je savais que je ne pouvais aborder ce sujet sans lire de la souffrance dans ses yeux. Je m’étais toujours sentie un peu à l’écart dans la vie quand il s’agissait de parler de sa famille. Mon père n’était pas mort, mon père était juste quelque part mais je ne savais rien de lui. Comment parler d’une personne qui existait mais dont on ne connaissait rien ? Ma mère avait bien voulu me donner quelques détails au fil du temps, comme le fait qu’il soit pompier ou qu’il aimait le jazz et les westerns. En grandissant et en regardant des films où une maman inventait un métier glorieux au géniteur de son enfant pour lui donner quelque chose, je me disais que ma mère avait peut-être fait la même chose. Je savais que si ma mère m’avait séparé de mon père mais je n’avais jamais compris pourquoi avoir rompu tous liens avec lui de façon si radicale.

Vers mes dix-sept ans, je cessai de me questionner et j’enfouis ce vide au fond de moi.

Comme beaucoup d’adolescentes de mon âge, je me mis à flirter avec des garçons durant mon adolescence. Je tombai amoureuse d’un garçon de ma classe à l’âge de quinze ans et naïvement on croyait que cette histoire entre nous durerait toute notre vie.

Habitant tout près d’une base militaire, il avait fallu que ce petit ami soit un fils de l’une d’elles. On savait qu’un jour ou l’autre, sa mère serait mutée à l’autre bout du pays, mais on vivait dans le déni. Un jour, en cours d’année, il m’annonça qu’il devait partir. Cœurs brisés pour l’un comme pour l’autre, on se promit de rester en contact. Ce ne fut pas le cas, enfin durant quelques mois mais plus le temps passait et plus les messages s’effilochaient. Notre histoire ne durera pas. Je mis un terme à cela quand, un test de grossesse à la main, je découvris que j’étais enceinte.

Il n’en su jamais rien. J’étais à quatre mois et demi, bien trop tard pour avorter. Je n’avais rien vu venir. Les vacances d’été approchant, ma mère me proposa de retourner sur Missoula le temps de la fin de la grossesse pour prendre le temps de savoir ce que je souhaitais faire de cet enfant. Pour moi, il était inconcevable que je devienne mère. J’avais des projets d’études et je n’étais clairement pas en capacité émotionnelle de gérer une maternité en plus de ma vie d’ado.

Je restai chez mes grands-parents maternels puis confia le bébé à une famille. Je retrouvai les bancs de l’école un peu après la rentrée mais personne ne me posa plus de questions. Ce secret resta à Missoula.

J’obtins une bourse pour l’université de Phoenix. J’avais décidé d’y faire des études pharmacologie. J’avais toujours eu pour vocation d’aider mon prochain dans le milieu médical sans pour autant devoir être en première ligne directe. En plus, ma mère m’avait transmis sa passion pour les plantes et la médecine traditionnelle alors je rêvais de pouvoir allier le métier de pharmacienne avec celui d’apothicaire. C’est ce que je fis.

Durant mes études universitaires, ma mère retourna habiter sur Missoula. Mon absence la laissant dans une solitude pesante, elle avait besoin de retrouver ses racines. Je terminai mes études et la rejoignis ensuite là-bas à mon tour.

J’étais employée dans une pharmacie quand j’entendis parler du projet de réhabilitation de la ville de Garnet. Ayant besoin d’un projet palpitant dans ma vie monotone, j’ai sauté sur l’occasion comme d’autres avant moi. J’ai acquis une maison et me voilà prête à investir les lieux !

Je continue de travailler à Missoula en attendant de pouvoir ouvrir ma propre pharmacie, ce que je pense réussir à faire assez rapidement si je m’en donne les moyens.

Et mon père me direz-vous ? Inconsciemment, je suis peut-être venu à Missoula pour retrouver sa trace en plus de rejoindre ma mère. Qui sait, un jour je croiserais peut-être ce pompier qui n’en est peut-être pas un…